L’énigme Anaïs Marcelli : la petite fille le corbeau et le tueur en série
L’énigme Anaïs Marcelli : la petite fille le corbeau et le tueur en série
Il y a plus de trente ans disparaissait la petite Anaïs, dix ans, à Mulhouse. La justice va comparer son ADN aux traces découvertes dans les effets de Michel Fourniret. Mais le coupable pourrait aussi être un mystérieux corbeau qui a revendiqué plusieurs crimes.
Fillette
Une fillette tuée, un corbeau revendiquant le crime et désormais un tueur en série soupçonné ? Plus de trente ans après les faits, l’affaire Anaïs, survenue à Mulhouse, conserve son épais mystère et la justice continue d’explorer toutes les pistes.
Hypothèse
Dernière hypothèse soulevée par les enquêteurs : l’implication de Michel Fourniret, le prédateur sexuel qui a rendu son dernier souffle lundi 10 mai 2021, à l'âge de 79 ans.
Énigme
L’énigme commence le 14 janvier 1991 lorsque la petite Anaïs Marcelli, dix ans, disparaît. Ses camarades de classe la voient quitter l’école de la rue de Nordfeld à 18 heures, vingt minutes plus tard, elle n’est toujours pas arrivée à son domicile.
Investigations
Prévenue par sa famille, la police démarre ses investigations à 20 heures. Les limiers du commissariat ouvrent toutes les portes possibles, du prédateur sexuel à l’entourage familial en passant par la fugue.
Troubles
Anaïs, décrite comme une enfant souffrant de la séparation de ses parents, et manifestants des troubles de l’humeur, baigne dans un environnement difficile.
Mère
Sa mère a déjà commis une tentative de suicide médicamenteuse et s’est installée en couple avec un homme, tout aussi fragile, qu’elle a rencontré lors d’une thérapie.
Courrier
De quoi réduire le courrier anonyme à une plaisanterie sordide ? Les mois suivants sèment le doute : d’autres lettres parviennent à des journalistes.
Jean-Pierre Foucault
Le 1er octobre 1991, l’animateur de TF1 Jean-Pierre Foucault reçoit une lettre fleuve dans laquelle le correspondant assure que les ravisseurs d’enfants parviennent toujours à leurs fins.
Enlèvement
Il donne l’exemple d’un enlèvement survenu dans la commune de Sainte-Savine (Aube). Le 22 octobre 1992, nouveau pli, cette fois à l’adresse de Patrick Meney, producteur sur la première chaîne TV française : le détraqué s'attribue le meurtre d’Anaïs.
Jacques Pradel
Suivront plusieurs enveloppes similaires destinées à Jacques Pradel, qui présente alors des émissions sur les faits divers à TF1. Dans un dernier courrier en 1995, il dit avoir agressé la petite Marcelli avec un complice.
Lettres
En tout, sept lettres glaçantes sont soumises aux experts. Selon leurs conclusions, l’expéditeur aurait utilisé des machines à écrire professionnelles électriques et pourrait évoluer dans le milieu administratif.
Fautes
Les quelques fautes d’orthographe qui parsèment sa prose semblent avoir été produites dans le but d’égarer les enquêteurs puisque l’inconnu serait de « formation supérieure » .
Auteur
En 1994, un linguiste impute les sept lettres à un seul et même auteur et relève dans ses expressions des « traces d’alsacianisme » indiquant qu’il aurait vécu au contact du dialecte alsacien.
Méfaits
Si le corbeau se contredit souvent et endosse un nombre de méfaits invraisemblable (plus de 600 rapts en 40 ans…), un élément prouve qu’il livre aussi parfois la vérité : la référence à l’enlèvement de Sainte-Savine.
Prédateur
Le 13 juillet 1974, soit dix-sept ans avant Anaïs, une enfant avait bien croisé la route d’un prédateur, qui l’avait violée puis relâchée sans être interpellé.
Victime
La police parvient à retrouver la victime et celle-ci confirme des détails de son calvaire, mentionnés par le rédacteur anonyme et qu’il était seul à connaître puisqu’ils n’avaient jamais été publiés dans la presse.
Bourreau
En particulier le fait que son bourreau l’ait obligée à lui uriner dans la bouche. Reste à savoir si le kidnappeur de Sainte-Savine est aussi celui de Mulhouse ou s’il s’attribue plus de passages à l’acte qu’il n’en a commis. Or, pendant ce temps, la PJ resserre ses filets autour d’un suspect : le grand-père maternel d’Anaïs.
Plus de trois mois après la disparition d’Anaïs, son corps sera retrouvé le 21 avril 1991, au col de Bussang, à une quarantaine de kilomètres de Mulhouse.
Homme
L’homme travaille à la fois pour EDF et la Matmut, dans des locaux sis au rez-de-chaussée de l’immeuble où vivait sa petite-fille.
Reconstitution
Une reconstitution organisée à l’automne 1991, et au cours de laquelle il montre des signes de fébrilité, atteste qu’il est le seul de la famille à ne pas disposer d’alibi.
Soupçons
Sa personnalité et ses secrets accentuent aussi les soupçons. père adoptif de sa fille, il lui aurait imposé des attouchements alors qu’elle avait l’âge d’Anaïs.
Ondinisme
L’audition de ses ex-compagnes révèle également qu’il pratique l’ondinisme, c'est-à-dire l'attirance sexuelle pour l'urine comme ce qui avait été infligé à la victime de Sainte-Savine…
Paris
Enfin, il est parfois amené à se rendre à Paris, dans le cadre de ses activités professionnelles d’où il aurait pu envoyer l’une des lettres anonymes.
Présomptions
Un faisceau de présomptions mais aucune preuve. Même après des années de progrès de la science, aucun ADN prélevé sur le corps ou les objets alentours n’est exploitable, la faute au manque de précaution pour manipuler les scellés, en 1991.
Photo
En prime, la victime de Sainte-Savine n’a pas reconnu son agresseur lorsqu’on lui a montré une photo du grand-père.
Pistes
En trente ans, d’autres pistes ont été creusées, la procédure refermée puis rouverte plusieurs fois. En 2019, une nouvelle audition du grand-père, au sein de l’Ehpad où il réside désormais, n’a rien donné, son état de santé étant trop dégradé.
Cas
Mais le travail de l’OCRVP le service de police sollicité pour dépoussiérer les cas irrésolus se poursuit. Plusieurs cold cases (au moins 22 selon nos informations) vont être confrontés à l’hypothèse Michel Fourniret, dont celui d’Anaïs.
Fourgon
L’ADN de la fillette sera comparé aux traces retrouvées dans le matériel du tueur en série, notamment sur un matelas et dans son fourgon à bord duquel il séquestrait ses victimes. Anaïs avait sensiblement le même âge qu’Estelle Mouzin, kidnappée à Guermantes (Seine-et-Marne) en 2003, et comme celle-ci, elle s’est évaporée en rentrant de l’école.
Alibi
Autre argument : Fourniret n’aurait pas d’alibi à cette date.L’avocat du père d’Anaïs, Thierry Moser, reste prudent : « Je me réjouis des investigations faites en direction de Michel Fourniret, mais je n’oublie pas que nous avons déjà dans le collimateur un suspect contre lequel il existe des éléments troublants. »
Investigations
« Si les investigations mettent hors de cause Fourniret, cela aboutira alors à une accentuation des charges rassemblées contre le suspect. » Pas forcément à une mise en examen. Comment expliquer qu’après trente ans, l’enquête n’ait jamais pu déboucher ?
Thierry Moser
« Ce dossier me meurtrit, confie Thierry Moser. S’il n’a pas été élucidé, c’est peut-être en raison de certaines erreurs commises par l’autorité judiciaire. »
Audition
Lorsque le grand-père d’Anaïs a été placé en garde à vue en novembre 1996, l’audition a duré quarante-cinq heures.
Vérité
Légalement, il en restait donc trois et je pense que ce crédit aurait pu être utilisé de façon positive pour aboutir à la vérité. « Mais pour des raisons que je ne comprends toujours pas, le juge d’instruction a mis fin à la garde à vue. »
Occasion
Une possible occasion manquée d’obtenir des aveux. Trois heures de gâchées pour trente ans de mystère.
Commentaires
Enregistrer un commentaire